CHAP. 5 à 9

 

CHAP. V.

Galinagues, samedi 30 mai 14h.

Le promeneur aimait bien la randonnée le Tour du Picou. Il l'avait fait déjà deux fois et ce jour il décidait de la parcourir dans le sens opposé. Parti de Galinagues, il monta le col Jean Blanc en direction de Rodome. Ca grimpait fort. Il commença à souffler et ralentit ses pas. 'Doucement Jacques !' se dit-il 'tu n'as plus vingt ans. Pas la peine d'être pressé.' Il s'arrêta et sentit que son cœur battait très fort... 'Voilà où tu en es. Mets-toi un peu au régime pour perdre quelques kilos de graisse ! Ça te fera du bien.' Il regarda derrière lui. Il fut surpris d'avoir fait déjà tout ce dénivelé. Il admira la vue sur une partie de la vallée du Rébenty et, plus haut, d'Espezel.

Il reprit l'ascension. Le chemin commençait à zigzaguer à travers la forêt et après trois cents mètres, il arriva enfin en haut. Il quitta le chemin à droite, sortit de la forêt et se dirigea vers le mât de la ligne à haute tension. Il s'assit sur un rocher et sortit une bouteille d'eau de son sac à dos. La vue qu'il avait à cent-quatre-vingt degrés devant lui valait bien un peu de souffrance.

C'était merveilleux. Droit devant il admira le pic de l'Ourthiset dans toute sa splendeur. En bas, il vit la route qui sortait de la vallée du Rebenty, avec Mazuby à sa droite et qui allait à Rodome à sa gauche. Toute cette magnifique nature baignait dans une agréable chaleur. Le soleil brillait dans un ciel bleu sans nuages.

Tout d'un coup le silence fut déchiré par le vacarme d'un moteur thermique. Il sursauta en voyant passer devant lui un ULM. 'Oh merde !' jura-t-il 'il ne manquait que ça pour gaspiller ma promenade. Qui peut bien s'amuser à voler avec un tel engin ? Des touristes sans doute, en quête d'un saut d'adrénaline !'

Il put voir le pilote, tellement l'avion était proche de lui. Dans un hurlement de moteur, l'ULM grimpa par-dessus Jean Blanc et disparut en direction de Rodome. Le bruit s'estompa net.

'Bon débarras ! J'espère qu'il ne revient pas !'

Il contempla encore quelques minutes ce magnifique paysage et décida de se remettre en route. C'était difficile de quitter cet endroit paisible. Il se dirigea vers la forêt pour reprendre le chemin en direction de Rodome.

Il entendit un sifflement et la flèche vint se planter dans sa poitrine. Avant de comprendre ce qui lui arriva, il était déjà tombé sur le dos en train de sombrer dans l'oubli.

Le tireur masqué sortit de la forêt. En dévissant l'arc il marcha vers sa cible. Avec l'outil dans sa main droite gantée il retira la flèche et la mit avec l'arc dans une mallette. Sans prêter plus d'attention à la victime il se retourna et alla vers la forêt. Il prit le chemin à droite et descendit en direction de Rodome...

 

CHAP. VI.

Galinagues, jeudi 4 juin, 13h

Sous un ciel très chargé en épais nuages, le lieutenant Dubois gara sa voiture sur le parking. Il coupa le moteur et aussitôt il entendit souffler le vent. Les rafales furent trembler la voiture. Il attrapa son imperméable et descendit. L'adjudant Lebrun l'attendit sous l'abribus. Ils se donnèrent la main.

'Bonjour adjudant. On se revoit et au même endroit en plus !'

'Oui lieutenant. Et quel temps, n'est-ce pas ? Ca souffle fort et il ne fait pas chaud pour ce début de juin. Bon, c'est là-haut !' Avec sa main il indiqua les montagnes en face du village. 'L'endroit s'appelle Jean Blanc. Nous prenons le 4 x 4 et je vais essayer de monter le plus haut possible.'

Ils prirent place dans la voiture quatre roues motrices de la gendarmerie. Lebrun quitta le parking et monta la route vers Rodome.

'Il a beaucoup plu ses derniers jours, donc il y a de la boue partout. Même le 4 x 4 patine.'

Trois cents mètres plus loin, Lebrun tourna à gauche sur un chemin forestier. L'eau coulait partout à travers le chemin, mais la voiture avançait encore. Un peu plus loin ils virent des voitures garées. Lebrun indiqua un chemin boueux à droite. Ca montait fort. 'C'est par là, lieutenant. Nous avons cinq cents mètres à grimper à pied. La voiture ne monte plus, trop de boue. Ils sont tous là-haut : le médecin, l'équipe technique, l'adjudant-chef et une équipe de gendarmes. Et tous sont montés à pied.' Il sourit.

'Donc, c'est à nous maintenant. Un peu de sport ne nous fera pas de mal.'

Vingt minutes plus tard, ils arrivèrent en haut. Lebrun quitta le chemin et sortit de la forêt.

'Attention aux rafales de vent, lieutenant, nous ne sommes plus couvert par les arbres.'

Le conseil de l'adjudant était à peine prononcé et le lieutenant faillit tomber en arrière poussé par une terrible rafale. Il tint bon et suivit Lebrun en direction du mât de la ligne électrique. Des nuages sombres flottaient au gré du vent et limitaient par moments la vue à une dizaine de mètres.

Lebrun bifurqua à droite en direction d'un énorme rocher. 'Ils essaient de se mettre à l'abri, lieutenant. L'adjudant-chef doit se trouver aussi derrière ce rocher.'

Dubois vit l'équipe technique s'activer et le médecin-légiste agenouillée auprès d'un corps étendu par terre. Il les observa lutter contre le vent. Il contourna le rocher et se trouva en face de quatre autres personnes: Lebrun, deux gendarmes et Rosenblum. Celle-là vint vers lui toute souriante. Il sentit qu'il faisait tout d'un coup quelques degrées en plus.

'On se revoit lieutenant, j'en suis ravie. Ce n'est malheureusement pas dans des bonnes conditions météo, je crains.'

'On peut le dire, adjudant-chef, ça déchire !'

Ils se serrèrent la main et Jérôme dit bonjour aux gendarmes.

'J'ai dû demander du renfort et ces messieurs viennent de Quillan. Il nous manquait des bras pour monter du matériel car impossible de monter en voiture !'

'Très bien Rosenblum. Alors, ça donne quoi ?'

'Ce matin un promeneur, un bûcheron, habitant Galinagues à trouvé un homme par terre ici. Sortir se promener par un temps pareil et en plus monter jusqu'ici, c'est presque un miracle. Il cherchait des champignons, figurez-vous. Bref, le cadavre : il s'agit d'un certain Jacques Guyot, soixante-dix-sept ans, habitant Alaigne. Nous avons trouvé son portefeuille sur lui. Je ne sais pas plus pour l'instant. Il faut rentrer à la brigade pour faire des recherches. Je pense que lui aussi faisait la fameuse promenade le Tour du Picou, comme l'autre victime. Et sa voiture se trouve aussi sur le parking de Galinagues.'

'Donc pas de vol non plus ?'

'Apparemment non, son argent est resté dans son portefeuille. Qu'est-ce qui se passe, lieutenant ? On tue les promeneurs maintenant ?'

'Je ne le sais pas encore. Je vais parler avec le médecin pour savoir si les meurtres sont liés.'

Il sortit de derrière le rocher et se dirigea vers le médecin. Il dut lutter contre les rafales de vent. Arrivé à trois mètres du cadavre, la tête du médecin se tourna vers lui et il fut heureux de reconnaître le docteur Sarda. Elle rangea ses affaires dans sa valise.

'Bonjour docteur !'

'Bonjour lieutenant. Quelqu'un sème des cadavres autour du Picou d'Arques...'

'Parce que les deux meurtres sont liés ?'

'Je pense que oui. Celui-ci est tué de la même façon que l'autre : un objet pointu a pénétré sa poitrine. Ça correspond, même diamètre aussi, pas de trace de lutte sur le corps non plus. Sa mort remonte à quatre jours sûrement. J'espère trouver plus à l'autopsie. Je vous tiendrai au courant, et maintenant je vais me mettre à l'abri.' Elle sourit.

'Bien sûr docteur, allez-y. Et merci.'

Il la regarda s'éloigner vers le chemin de la promenade, courbée contre ce foutu vent. Il resta là un petit instant et pensa à ce qu'elle venait de lui dire. Le même tueur. Ça allait mettre la pression.

Jerôme vit le cadavre par terre: la pâleur du visage, les vêtements détrempés et surtout ce corps gonflé, prêt a exploser. "Quel métier aussi, médecin-légiste, couper dans cette pourriture. Heureusement qu'elle ne me demande pas d'assister à l'autopsie".

Une secousse de vent le sortit de ses pensées. Il secoua sa tête et alla vers le rocher pour se mettre à l'abri. L'équipe technique les avait rejoints. Sous les capuches de leurs combinaisons il reconnut le photographe et l'adjudant Belôch.

'Mademoiselle, Messieurs, bienvenus sous l'abri. Pour notre bien-être il manque un petit feu et des chaises.'

'Et le pastis, lieutenant !' Ce fût l'avis de l'un des gendarmes.

'Le pastis bien sûr, comment j'ai pu oublier !' Ils rigolèrent tous.

'Alors Belôch, des bonnes nouvelles j'espère ?'

L'adjudant le regarda et reprit son sérieux. 'Je crains que non lieutenant. Il pleut depuis lundi. S’il y avait la moindre trace, la flotte et le vent ont tout effacé. Nous n'avons rien... Pas d'empreinte, pas trace de pas, ni de lutte et bien sûr pas d'arme de crime. Il nous reste sa voiture, mais j'ai peu d'espoir là aussi. Je suis désolé.'

'Merci adjudant, je vous fais confiance. La moindre indice, vous m'appelez ?'

'Evidemment lieutenant, à très bientôt.'

Belôch et le photographe partirent aussitôt.

'Bon, mademoiselle, messieurs, je pense que nous pouvons enlever le corps. Nous ferons le point à la brigade.'

Rosenblum donna quelques ordres et les deux gendarmes et Lebrun quittèrent l'abri. Ils prirent un brancard et marchèrent vers le cadavre. Dubois les regarda faire.

'Leur tâche sera rude, Rosenblum, descendre le corps à travers la boue.'

Elle le regarda : 'Oui, lieutenant, très rude. Mais il sont trois et trois très costaud en plus ! De toute façon nous n'avons pas le choix, l'hélicoptère ne peut pas venir. Il y a trop de vent.'

Elle regarda autour d'eux et dit : 'Il me semble que nous n'avons rien oublié. Nous pouvons y aller aussi. J'en ai plus qu'assez de ce terrible vent !'

Jérôme ne put qu’être d'accord avec elle et ils se mirent en route vers le chemin. Dès qu'ils entrèrent dans la forêt, le vent s'arrêta net. Cela faisait du bien, c'était comme un soulagement. Ils attaquèrent la descente vers Galinagues.

 

CHAP. VII.

 

Une heure plus tard, ils entrèrent à la brigade à Belcaire.

'Venez Rosenblum, nous allons dans le bureau pour faire le point.' Ils prirent place au bureau face à face.

Il l'observa. Elle avait l'air préoccupée et surtout fatiguée.

'Ça va ? Fatiguée ?'

'Oui lieutenant. Pardonnez-moi, j'ai eu une journée rude.' Elle fit un effort pour se concentrer.

'Ce n'est pas grave. Pas la peine de vous excuser. Je voudrais juste voir avec vous les différentes tâches qui nous attendent pour demain. Si vous pouvez contacter Alaigne pour des renseignements sur monsieur Guyot. Demandez aux collègues de questionner les voisins. Nous devons aussi chercher si il y a un lien entre Calvel et Guyot.'

'Ça sera pour Lebrun. Il est très fort en informatique.'

'Très bien, mais ça peut attendre demain matin s'il rentre tard.'

'Ok, ça marche. Vous pensez quoi de ces meurtres ?'

'Selon le médecin les deux sont tués de la même façon : un objet pointu dans la poitrine. Nous pouvons donc penser qu'il s'agit du même tueur et ce tueur est très prudent et efficace. Il donne un coup mortel et disparaît sans laisser la moindre trace.'

'Vous pensez qu'il connait ses victimes ?'

'Oui en effet. Il ne tue pas au hasard. Il n'y pas eu lutte, ils étaient en confiance.'

'Ils se promenaient ensemble ?'

'C'est fort possible ou il les attendait. Mais ça c'est de la spéculation. Ce qui est sûr est que l'enquête ne sera pas facile. Le temps est contre nous : on trouve les cadavres trop longtemps après l'acte. Cela diminue nos chances de trouver, mais restons positifs, il le faut.' Il soupira en regardant sa montre. 'Bon Rosenblum, il est presque dix-huit heures. Je vais rentrer chez moi faire le plus dur : informer le procureur... Jusqu'à maintenant il a été très correct et compréhensible. J'espère qu'il reste comme ça maintenant que c'est sûr qu'il s'agit d'un tueur en série. On se verra demain matin alors.'

'Bon, à demain lieutenant.'

Jérôme se leva et sortit du bureau. Venu à la porte il se retourna et dit : 'Vous aussi Rosenblum, allez chez vous, vous reposer. Vous en avez besoin. Bonne soirée.'

Elle hocha la tête et sourit.

Il sortit de la brigade et alla vers sa voiture. Elle l'observa démarrer et quitter le parking. Elle resta un moment dans ses pensées, puis se retourna et alla s'assoir à son bureau. Elle alluma l'ordinateur.

 

CHAP. VIII.

Belcaire, vendredi 5 juin, matin.

La journée s'annonçait belle. Durant la nuit le vent était tombé et ce matin le soleil essayait son retour, luttant encore contre les derniers nuages. La température grimpait de nouveau.

Quand le lieutenant Jérôme Dubois entra à la brigade de Belcaire, il retrouva Rosenblum et Lebrun et, nouveau, un jeune homme assis à l'accueil. Tout le monde donnait l'impression d'être reposé et en forme. Le lieutenant dit bonjour.

'Bonjour lieutenant, je vous présente Pierre, il est notre nouveau stagiaire. Vous voulez du café ?'

'Volontiers, Lebrun, merci !'

Il regarda Rosenblum et demanda : 'Nous allons nous asseoir pour parler enquête ?'

Quelques minutes plus tard ils étaient assis autour du bureau avec le café fumant devant eux. Tout le monde était d'accord sur un point : Lebrun faisait du bon café !

'Le secret', il disait 'c'est la cafetière à piston, une bonne dose de bon café, l'eau bouillante, remuer et attendre deux minutes avant de pousser le piston. Prêt à savourer 

Dubois posa la première question :

'Est-ce qu'on sait plus sur Jacques Guyot ?'

Rosenblum répondit :

'On sait très peu pour l'instant : Jacques Guyot, soixante-dix-sept ans, marié, pas d'enfants. Son épouse est atteinte de la maladie d' Alzheimer. Elle est à la maison de retraite de Couiza. Ils ont un service spécialisé dans cette maladie. Apparemment elle est en stade terminale : elle vit dans son monde, reconnaît plus personne et ne parle plus. Donc pas la peine de l'interroger.'

'Qu'est-ce que les collègues disent de Jacques ?'

'Ils le décrivent comme un homme paisible, sans histoires. Ils ont questionné les voisins. Rien de ce côté non plus. Un homme réservé, sympa, un brin taciturne même, qui allait voir son épouse deux fois par semaine.'

'Adjudant, est-ce que vous avez trouvé un lien entre Guyot et Calvel ?'

Lebrun soupira : 'Rien lieutenant. L'ordinateur nous n'a rien donné. Aucune trace d'eux dans nos fichiers, même pas une amende.'

Le silence s'installa un moment. Ils burent leur café en réfléchissant.

Le bruit strident d'un portable interrompit ce moment de réflexion. Jérôme décrocha.

'Lieutenant Dubois, bonjour !'

'Bonjour lieutenant, ici docteur Sarda.'

'Un instant, docteur, je mets le haut-parleur. Voilà, je suis à la brigade de Belcaire avec Lebrun et Rosenblum.'

'Bonjour tout le monde. J'ai terminé l'autopsie de Guyot. Je peux dire qu'il est tué de la même façon que Calvel : un objet pointu a transpercé le cœur, même diamètre : 7 mm. Et surtout de nouveau qu’un coup donné. Pour moi pas de doute, c'est le même tueur.' Elle se tut.

'Autre chose d'important, docteur ?'

'Pas vraiment, non. Sa mort remonte à une semaine... je dirai samedi dernier. Je n'ai trouvé aucune trace de lutte, pas d'ecchymoses. Cette autopsie était comme un déjà-vu de Calvel. Je suis désolée, je n'ai rien de nouveau pour vous. Je vous envoie le rapport.'

'Merci docteur, au revoir.' Il raccrocha et soupira. 'Voilà, nous sommes de nouveau à la cage de départ. Beloch non plus n'a rien trouvé. Ni sur la victime, ni dans la voiture. Résumons : deux victimes, retraités, vivants seuls, tués de la même manière : un seul coup, pas de trace de lutte, pas d'arme de crime, aucune empreinte. Sur Calvel, le labo a trouvé des traces d'aluminium autour de la blessure. Donc, nous cherchons un objet pointu en alu.'

Rosenblum continua : 'Un tueur qui les connaissait assez bien pour savoir qu'ils venaient faire la promenade du Picou. Il savait la journée et l'heure... Est-ce qu'il est venu avec les victimes en voiture ? Je ne pense pas, comment il serait parti après, vu que les voitures sont restées sur le parking ?'

Ils se regardèrent. Personne ne sut plus quoi dire.

Après un moment Lebrun mit fin au silence : ''Est-ce que le tueur va continuer à tuer ?'

'Voilà la question' soupira Dubois. Je pense que oui. Est-ce qu'on peut parler d'un tueur en série ? A mon avis ce n'est pas un psychopathe : ses meurtres sont sans violence extrême, sans torture, c'est rapide et net. Les personnes sont tuées sur place et abandonnées. Je pense que le meurtrier se débarrasse de ses gens, parce qu'ils lui ont fait quelque chose. Il prend sa revanche en quelque sorte, vous me suivez ? La question est : combien de personnes sont impliquées ? Donc si nous ne le rattrapons pas, il va continuer jusqu'à l'acquisition de sa revanche. Si mon raisonnement est correcte il y a donc sûrement un lien entre ces gens.'

'Autre chose'?

'Oui', dit Rozenblum timidement. 'Nous sommes harcelés par les maires de Galinagues et Rodome et les habitants du Plateau de Sault. Ils expriment leur inquiétude, certains mêmes ont peur. Nous essayons de faire face et de les rassurer, mais c’est très difficile surtout parce que nous ne savons pas quoi leur dire par manque d'indices. Deux meurtres en à peine deux semaines dans un pays ou se passe rarement quelques chose: il y a de quoi à bouleverser les habitudes'.

Oui, je comprends très bien. Je vais en parler avec le procureur, cette après-midi. Voir comment rassurer et calmer les esprits'.

 

CHAP. IX.

A dix-sept heures quinze ce vendredi, le lieutenant Dubois rentra chez lui. Il venait de quitter le procureur. En conduisant il pensa à l'entretien qui avait duré presque 'une heure. Le procureur l'avait questionné sans arrêt. Il restait poli, mais Dubois sentait que la pression montait. Mais qu'est-ce qu'il pouvait bien lui dire ? L'enquête était au point mort, voilà, tout était dit. En réponse à la demande de Jérôme comment réagir sur les inquiétudes de la population du Plateau de Sault, le procureur proposait de faire une conférence de presse comme il faut. Il allait mobiliser le capitaine Orvin, chargé des relations avec les médias et tout préparer pour demain. A la fin de l'entretien, le procureur lui proposait même du renfort de personnel, ce que le lieutenant avait poliment refusé. Pour le moment.

Dix minutes plus tard il entra Laderne-sur-Loquet et se gara devant chez lui. Dès qu'il poussa le portail il se sentit bien. Le jardin qui entourait la maison dégageait calme et paix. Il contourna la maison pour entrer par la terrasse, mais en voyant Céline, son épouse, dans le potager au fond du jardin, il alla à sa rencontre.

'Ça pousse ?' Il la regarda. Il la trouva croquante dans son jean et T-shirt moulant. Ses habits mettaient bien en valeurs ses superbes formes.

'Ah te voilà, chéri !' Elle vint vers lui et l'embrassa. 'Je suis contente que tu es là. Et oui, ça pousse bien. Quelle belle journée aussi !'

Il la serra fort contre lui... ça lui fit un bien fou.

'Viens nous pouvons nous asseoir sur la terrasse. C'est l'heure de l'apéro. J'ai soif moi ! Et nous pouvons bavarder un peu.'

'Bonne idée. Nous buvons quoi ?'

'J'ai ouvert une bouteille de vin. Du très bon. Un 'chapeau' de Zaparel.'

Entendre prononcer ce nom lui mit l'eau dans la bouche.

'Je vais vite me changer. Tu as deux minutes ?’

'Vas-y pendant que je sers le vin et quelque chose à grignoter.'

Il entra dans la salle de bain, enleva son uniforme et enfila un jean et T-shirt. Il se rafraîchit les mains et le visage et deux minutes plus tard il joignit son épouse sur la terrasse. Elle lui tendit un verre de vin. 'A la nôtre !' Ils trinquèrent.

'Que c'est bon... Ça fait du bien  !' Il ferma les yeux et savoura ce bon vin Demeter. 'Les enfants ne sont pas là ?'

'Non, Oscar et Anna sont avec Ian et Aria, leurs copains, tu sais les enfants de Lynn et John. Ils vont rentrer vers dix-neuf heures.'

Ils aimaient bien Lynn et John. Des Anglais qui avaient acheté la deuxième maison à côté presque au même moment, il y déjà dix ans. John avait vu qu'ils rénovaient la maison avec des matériaux naturels, chaux, chanvre, briques en terre cuite, et n'avait pas tardé à venir faire connaissance. Comme John venait d'arriver en France, il voudrait savoir où trouver ces matériaux. Après ils découvraient que ces Anglais étaient aussi végétariens et bios. Ca créait des liens solides.

'Est-ce que t'as passé une bonne journée ?’

'Oui, j'adore le travail dans le potager, tu le sais bien. Tout pousse à merveille. J'ai repiqué salades et fenouils et j'ai désherbé Et toi ?’

'Ça va. Juste cette enquête qui est bloquée. Mais là c'est le week-end. Je vais essayer de ne pas y penser. Il faut que je patiente et tôt ou tard le tueur fera une faute et nous le trouverons.'

Il aimait bien parler enquêtes avec Céline. Elle apportait parfois des idées originales et fraîches et ça donnait un autre angle d'attaque.

'Tu sais que c'est bientôt l'anniversaire d'Oscar ?’

'Ah oui, c'est le quinze. Dix ans déjà ! Le temps passe vite.'

'Ça oui. Il m'a parlé d'un cadeau qu'il aimerait avoir : un arc, un vrai.'

'Un arc  ? Mais je trouve ça très bien. Waw, je me vois déjà tirer à l'arc avec lui !’

'Voilà moi aussi.' Elle rigola. 'Grand enfant comme tu es.'

'Tu veux que je regarde avec lui sur internet, ou ça doit être une surprise ?’

'Non, c'est lui qui en a parlé. Je pense qu'il va adorer le commander avec toi.'

'Je le ferai avec lui ce soir. Est-ce que tu as besoin d'aide pour le repas ?’

'Non, tout est prêt. J'ai fait des lasagnes aux légumes. J'ai juste à les mettre au four vers six heures et demi. Ça nous laisse du temps pour bavarder et savourer ce bon vin.'

Ils rapprochèrent leurs chaises, Jérôme mit son bras autour des épaules de Céline et ils s'embrassèrent

Après un délicieux repas, Jérôme et Oscar s'installèrent devant l'ordinateur. Il ouvrit Internet Explorer et tapa  : 'arc pour enfants'.

'T'as vu Oscar  ? Il y a le choix. Quel site on regarde ?’

'Celui-là.' Il pointa : 'archerie.com arc pour enfant et débutant'.

Jérôme cliqua dessus en observant son fils... ses yeux brillèrent de contentement. Il fut tout excité.

'Oscar, il faut choisir selon âge et/ou taille. Il y a des kits tout prêts.'

Il cliqua sur 'âge dix-douze ans'. La page s'ouvrit sur un superbe arc.

'Il te plaira ?' Vu l'enthousiasme de son fils, la question était inutile.

'Bon, on le met dans le panier. Qu'est-ce qu'il te faut encore ?’

'Un cible et des flèches, bien sûr, papa !’

'Ah oui. Voyons pour une cible. Voilà : cible en liège. Dans le panier. Tu sais Oscar, je mets tout dans le panier et après je parlerai avec maman pour voir si tout ça entre dans le budget prévu pour ton anniversaire, d'accord ? Maintenant les flèches.'

Il y  avait le choix en carbone, en aluminium ou en bois.

'Alors fiston ?’

'Carbone ?’

Jérôme ouvrit la page. La description s'afficha. Il la lu et vit la longueur et le diamètre. 'On regarde aussi aluminium ?’

Oscar était d’accord.

Il regarda la description et le diamètre : sept millimètre. Tout d'un coup il se figea : sept millimètre, sept millimètre diamètre.. L'enquête fut surface dans sa tête et il vit le docteur Sarda 'Cherchez un objet pointu de sept millimètre diamètre... trace d'aluminium autour de la plaie de Calvel.'

'Voilà l'arme des crimes  !!'

Il se tourna vers son fils et jubila : 'J'ai trouvé ! J'ai trouvé !’

Oscar, les yeux et la bouche grand ouverts regarda son père attraper son portable.

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